Fanomenjanahary Robert Protais et Fanomezanasoa Richard
Protais et Fanomezana sont deux petits frères qui habitaient avant (jusque 2004) dans le quartier. Le plus âgé des deux nous « tomba dessus » parce qu’il avait une grosse éruption cutanée. Après l’avoir emmené chez le docteur et après avoir appris son histoire, nous les avons – son petit frère, sa petite soeur et lui -, d’abord laissé déjeuner le midi avec nos autres enfants. Leur père est inconnu, et leur mère a disparu après la naissance du plus jeune et n’est jamais revenue.
Ils habitaient avec la soeur de leur grand-mère et ses filles dans une maison, mais n’avaient pas de lit, seulement les quelques vêtements qu’ils portaient, rien de plus. Fanomezana, le plus âgé devait s’occuper du repas de ses frère et soeur. A l’aube, il allait chercher de l’eau, rassembler du bois et faire cuire le peu de riz qu’il avait reçu de sa famille. Personne n’avait jamais remarqué qu’il avait une infection de la peau et qu’ils étaient tous les trois gravement sous-alimentés. En bref ces enfants étaient négligés par leur propre famille. Nous decidâmes directement de d’abord les laisser manger chez nous à midi et de nous occuper de la maladie de Fanomezana, de lui faire sa toilette et de s’en occuper. Après quelques semaines, cela allait déjà mieux, mais un jour nous apprîmes la triste nouvelle que sa soeur était décédée pendant la nuit. Elle avait vomi le soir et était morte le lendemain. La famille ne nous avait rien dit, autrement nous aurions peut-être encore eu le temps de l’emener à l’hôpital.
Depuis lors, nous avons pris les deux frères chez nous à la maison afin de nous assurer qu’ils ne leur arrive rien de semblable. Rapidement, nous avons dû faire hospitaliser Fanomzana durant deux semaines, dans une section spéciale pour enfants malnutris. Il avait notamment un ventre terriblement et anormalement gros et ses pieds commençaient à enfler. Cela provenait du fait que son corps n’a pas pu s’adapter au changement radical d’une nourriture équilibrée après une malnutrition prolongée.Normalement, cette section de l’hôpital est dédiée aux enfants de 6 mois à 5 ans, mais Fanomezana avait à 10 ans la taille et le poids d’un enfant de 5 ans ( !), et a donc été accepté. Cette section est financée par l’Union européenne, et les enfants y suivent un régime de lait avec de l’huile et des vitamines en plus de deux bons repas par jour. Il en sortit après deux semaines, et depuis il se porte très bien. Il reste bien trop petit pour son âge, mais il suivait de mieux et mieux à l’école et il a même réussi son examen de fin de primaires en juin 2008 et peut intégrer l’école secondaire.
Son petite frère Protais est beaucoup plus fort que lui, notamment parce qu’il a été moins longtemps malnutri, et se porte très bien.
Ranaitafika Marcel
Lorsque Madame Honorine habitait encore son petit appartement en ville (en 2000) et traversait chaque jour le rond-point en allant au travail, elle découvrit un beau jour deux petits garçons en train de pleurer sous le grand hibiscus. C’était Lita et son petit frère.
Leur mère les avait laissés là ce matin-là. Lorsque Honorine revint de son travail d’appoint en tant que laveuse à l’hôtel, les enfants étaient encore là. Après une heure, la mère revint et raconta qu’elle cherchait du travail en ville parce qu’elle ne’avait plus les moyens de s’occuper de ses enfants vu qu’elle n’avait plus rien, pas de maison ni de terre, pas de travail ni d’argent. Honorine les a emmenés chez elle. Le lendemain, elle dit à la mère que Marcel, le plus âgé, pouvait rester chez elle et aller à l’école et qu’elle nécessitait pour cela son acte de naissance. La mère partit pour régler cela, mais elle n’est jamais revenue. Nous demandons encore règulièrement autour de nous si quelqu’un a de ses nouvelles, mais personne ne peut nous dire où elle se trouve. Lita est entretemps passée en école secondaire et en juin 2008, elle est passée en deuxième année.
Sahondramalala Marie Veronique et Lalaonirina Lisette
Veronique et Lisette ont directement été emmenées et hébergées (temporairement, jusqu’à ce que la nouvelle maison soit prête) chez une connaissance d’Honorine. A partir de ce moment, elles ont commencé à aller à l’école. Leur petite soeur, encore bébé, est restée chez leur mère, mais est ensuite rapidement décédée. En 2007 leur mère est également décédée par suite d’alcoolisme. Les cinq autres enfants étaient les enfants de Rakoto et Jacqueline dont il est question ci-après. Dès que la nouvelle maison fut prête, en 2003, Veronique et Lisette sont aussitôt venues y habiter auprès d’Honorine et des autres enfants. Lisette monte maintenant en deuxième année de l’enseignement secondaire et Veronique en dernière année d’école primaire.
Rojotiana Philomene
Rojo habitait avec la soeur de sa grand-mère et son oncle dans une petite maison du quartier. Nous la voyions très souvent tard le soir et tôt le matin en rue, aller chercher de l’eau ou faire des courses. Elle n’avait encore que quatre ans, et paraissait très triste. En questionnant sa famille, il est apparu que son père était inconnu et que sa mère était partie on ne sait où quelques années plus tôt sans jamais revenir.
Sa « grand-mère » était trop âgée pour travailler et son oncle était un ivrogne. Le fait qu’elle dormait dans le même lit que lui nous a fort préoccupé. Depuis lors, elle est venue dans notre classe de maternelle, mais elle était très malada au début. Rapidement, nous avons décidé qu’elle pourrait aussi venir habiter chez nous. Sa « grand-mère » était fort soulagée que nous voulions prendre soin de sa « petite-fille ». Cette année elle entre en troisième année de l’école primaire.
Emmanuela Lalasoa
Cette fille errait en rue avec un homme. Une femme arriva chez nous avec eux Nous sommes allés avec eux à la police, et celle-ci a gardé l’homme parce qu’il n’avait pas de papiers d’identité et qu’il ne pouvait pas démontrer qu’il était le père de la fille. Emma resta chez nous cette nuit-là. Le jour suivant, l’homme fut libéré pour aller chercher ses papiers d’identité, mais il est parti on ne sait où et n’est plus jamais revenu.
Nous ne savions absolument rien de cette petite fille et elle ne se souvenait pas de grand-chose de sa vie. Elle était encore très petite. Nous avons passé des appels via la radio et la police pour tenter de retrouver sa famille, mais en vain. Nous pensons qu’elle vient du la côte sud-est, parce qu’elle ressemble fort aux gens de là-bas. Il se pourrait qu’elle ait une soeur jummelle là-bas, car les gens de là-bas voient la naissance d’un jumeau comme une maédiction et abandonnent des enfants dans la plupart des cas. Nous avons bien sur décidé qu’elle pouvait aussi rester chez nous. Elle parait très intelligente et travaille très bien à l’école.
Fanomezanahary Lalatiana (Lala)
Elle habite chez Honorine avec son grand frère Fanomesantsoa Herynirina Daniel (à droite, sur la photo du dessous) depuis 2001. Daniel était un des premiers enfants à venir habiter chez Honorine. Ce sont des enfants de Marie, une dame aveugle qui essaie d’obtenir sa ration de nourriture quotidienne en mendiant à la gare des bus. Daniel, à six ans, portait en permanence sa petite soeur sur le dos et mendiait avec sa mère. Mais il voulait aller l’école et prit contact avec la propriétaire d’un hôtel dont il avait entendu qu’elle venait en aide aux enfants pauvres.
Il reçut d’abord une couverture, mais bien vite, elle lui fut volée durant une nuit qu’il passa sur le marché. Lorsqu’il retourna chez la dame pour lui demander de l’aide et qu’il lui raconta qu’il voulait aussi aller à l’école, elle l’emmena chez Madame Honorine. Celle-ci lui répondit qu’il pouvait rester et aller à l’école. Il demanda si sa soeur pouvait aussi venir habiter là, parce que sa mère ne pouvait pas non plus s’occuper d’elle. Ce fut un peu plus compliqué parce qu’elle était encore allaitée au sein, mais après quelques mois, Lala est aussi venue habiter chez Honorine. Mère Marie était fort soulagée car elle n’aurait jamais pu mettre ses enfants à l’école.
Lantosoa Andriamantionona (Lanto)
Lanto, le petit garcon à gauche sur la photo, et sa soeur Solo furent, en 1999, les premiers à venir habiter chez Honorine. Sa sœur était dans la classe d’Honorine et ne venait pas souvent ; et lorsqu’elle venait, elle dormait en classe. Lorsque Honorine lui demanda où elle habitait et comment il se faisait qu’elle était si souvent absente, Solo raconta que leurs deux parents étaient décédé rapidement l’un après l’autre, qu’ils habitaient chez leur oncle mais que celui-ci ne les traitait pas très bien.
Ils devaient parfois dormir dehors et son petit frère ne pouvait pas aller à l’école parce qu’il devait s’occuper des vaches de leur oncle. Il errait tous les jours, par monts et par vents, dans les champs auprès de deux vaches, alors qu’il n’avait encore que sept ans. De plus, ils habitaient si loin de l’école qu’ils n’avaient parfois pas la force de marcher si loin car bien souvent ils ne recevaient rien à manger le matin.
Honorine lui demanda d’abord de venir manger chez elle après l’école (l’école est de 7h à 13h), afin qu’elle ait au moins un bon repas par jour. Ensuite, contact a été pris avec la famille, et il a été décidé de commun acord que les enfants iraient dormir chez Honorine. Entretemps, Solo s’est mariée et a une petite fille, son mari vit dans le même district que celui où vivent aussi les autres enfants, et Lanto est en troisième année d’enseignement secondaire.
Les six enfants de Jacqueline et son mari Rakoto
Andriamaro Jacquis (Mamaro, 8 ans)
Avotrinirinaina (Dada, 10 ans)
Andriahandry Rado (Balita, 12 ans)
Razafiharisoa Olga (13 ans)
Andriamanampy Haja (15 ans)
En haut, les six enfants de Jacqueline et son mari Rakoto. Rakoto est aveugle depuis sa naissance, il mendie caque jour devant la grande cathédrale de la ville. Sa femme Jacqueline est presque tous les jours ivre. La fondation a appris à les connaître lorsq’ils furent emmenés par Lisette et Veronique, chez elles. Leurs parents leur partageaient leur dépendance à l’alcool et l’abri dans lequel ils habitaient.
La fondation loua diretement une chambre en ville afin de prendre en charge les cinq enfants et leurs parents. On a tenté d’aider la mère à mettre en place un petit commerce de sandwiches. Après la naissance de son sixième, elle fut contrainte à la contraception. Mais l’aide n’a pas fonctionné : en peu de temps, elle a vendu toutes les affaires qu’elle avait reçu – y compris les vêtements pour les enfants – et s’est acheté du ruhm local avec l’argent ainsi rapporté.
Lorsque la nouvelle maison de la fondaton fut prête en 2003, on loua une maison dans le voisinage afin de mieux garder la famille à l’oeil. Mais cela n’a pas non plus fonctioné. Les enfants n’allaient pas souvent à l’école, parce qu’il n’y avait rien à manger, leurs vêtements étaient trop sales et en trop mauvais état (tous ce que nous donnions était aussitôt renvendu). Les parents se battaient régulièrement et battaient leurs enfants. Tout cela se produisait lorsque la mère était ivre.
Après quelques mois, nous avons decidé, que ça ne pouvais plus continuer comme ça, les enfants avaient mauvaise mine, ils étaient gravement sous-alimentés malgré tous nos efforts. Les gens du quartier non plus ne voulaient plus voir les parents dans leur quartier, parce que leurs disputes nocturnes réveillaient tout le voisinage.
Depuis lors les enfants vont mieux. Mais les jeunes surtout sont fortement retardés et sont vraiment très petits. Heureusement ils ont chaque jour plus d’énergie et ils s’en sont sorti. La plus âgée, Haja, entre en deuxième année de l’école secondaire.
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